Cahier de Mondial – Entrée #2 : “L’amour sans préliminaires”

Quelque part en Espagne, il y a un type qui, le 31 décembre dernier, a probablement dû, comme chaque année, avaler un grain de raisin sur chacun des 12 coups de minuit. Un vœu pieux qui répond moins à un quelconque espoir qu’à la force de l’habitude. À ceci près que ce même type vient d’empocher 137 M€ à la cagnotte de l’Euro Millions. Ce fut probablement le seul Ibère à festoyer ce jour-là qui marquait l’entrée en lice du tenant du titre espagnol, corrigé par des Oranje mécaniques. Argent toujours, la journée avait débuté par la décevante première sortie des syndicalistes camerounais pour s’achever par une confrontation très agréable entre le Chili et des Socceroos à la recherche du bonus défensif. Hommage capillaire, saut de l’ange, hors-jeux fictifs et envolées lyriques en cabine commentateur, c’était le menu de ce vendredi 13 juin 2014. Superstition ain’t the way

Pays-Bas_Espagne_13062014

C’est pratique la journée d’ouverture : un match et basta ! Certes, tu dois te farcir la kermesse, mais derrière, 90+ minutes de ballon et tu peux retourner vaquer à ton semblant de vie sociale. Ton lit, en fait, rapport au décalage horaire. Le lendemain, c’est autre chose : 3 matchs (18, 21 et 00h) et vive le binge mondialing ! Une montre arrêtée continue de donner la bonne heure deux fois par jour. Là, c’est pareil, les jours consacrés au match inaugural et à la finale te font passer pour à peu près sain d’esprit, les autres pour un autiste fini. Tant pis…

“Dieu tout-puissant nous a donné l’honneur de porter le plus beau maillot du Monde. Cela n’a pas de prix. Nous voulons mériter ces couleurs, “pour remplir notre devoir toujours”.”

Ces mots empreints de réserve et de mesure sont signés de Samuel Eto’o Fils, attaquant/capitaine/sélectionneur de l’équipe nationale du Cameroun. Ils sont tirés d’une lettre ouverte de deux pages adressée “aux Camerounais” à la veille de la rencontre face au Mexique via le compte Twitter de Sa Majesté. Si vous connaissez mal le football, Samuel Eto’o est à la modestie ce que les Crocs sont à l’élégance. Un mec capable de la pire des démagogies comme de se pointer avec une raie improbable au milieu du crâne dans un hommage capillaire à Nelson Mandela. Le plus drôle là-dedans est sans doute de préciser que porter le maillot du Cameroun n’a pas de prix lorsque l’on sait que la sélection a refusé de monter dans l’avion pour le Brésil pour une sombre histoire de primes. C’était d’ailleurs l’objectif de cette missive, expliquer/justifier ce cupide épisode auprès du plus grand nombre. Sauf que, Samuel, si tu veux verser des larmes de crocodile pour faire pleurer dans les chaumières, te répandre sur Internet ne dépassera jamais l’interview en claquettes à Téléfoot. Jamais.

Finalement, l’équipe est arrivée en retard au Brésil. Elle a accusé un léger retard de 90 minutes au coup d’envoi du match et sans un arbitrage éhontément favorable, elle aurait encaissé 2 buts dès la première mi-temps par Giovani dos Santos, un état-civil de figurant de Confessions Intimes. Un seul a suffi à l’heure de jeu, signé Peralta (1-0, 61’). En bon écolo, Sam a évité le gaspillage de papier en publiant sa lettre ouverte sur les réseaux sociaux. En bon écolo, sa sélection pensait (se) faire le Tri. C’est râpé…

“Il va venir lui faire l’amour sans préliminaires, laisser la carte de visite…”

Le bonheur des groupes relevés, c’est d’avoir le remake de la finale de la précédente édition dès le premier match de poule des deux participants. Ah 2010… La poitrine de Xabi Alonso en vibre encore. D’émotion, non, plutôt des crampons de Nigel de Jong dont il avait fait la rencontre un tantinet violente.

Pour comprendre la difficulté d’entamer une Coupe du monde dont on est le champion en titre, souvenez-vous de 2002, de ce France/Sénégal de funeste mémoire. La comparaison s’arrête là, se faire poutrer par El-Hadji Diouf et Papa Bouba Diop (that name!), c’est quand même moins sexy que par Robben et Van Persie…

Diego Costa est un génie : il est brésilien, né au Brésil et a choisi, après avoir disputé deux matchs amicaux avec les auriverde, de finalement défendre les couleurs de l’Espagne. On comprend (sans excuser) pourquoi une partie du public avait cassé son PEL pour venir le siffler. Mais Diego s’en fout, il est libre dans sa tête. Il pousse même le vice jusqu’à s’écrouler dans la surface après une faute pas évidente. Il fait pas grand chose pour se faire aimer ce garçon... L’arbitre ne lui en tient pas rigueur et offre le coup de pied de réparation à l’Espagne, converti par Xabi Alonso (1-0, 27’). On s’attend dès lors à une furia roja, mais juste avant la mi-temps, Robin Van Persie se sent pousser des ailes. L’acolyte de Batman était acrobate, son homonyme exécute un numéro de haute voltige en reprenant un long (et bon) ballon d’une sublime tête plongeante qui laisse pantois Casillas (1-1, 44’). Au retour des vestiaires, les Néerlandais ne laisseront aucune chance à leur adversaire alourdissant le score par Robben (2-1, 53’, 5-1, 80’), De Vrij (3-1, 65’) et Van Persie (4-1, 72’) à nouveau. Le second but de Robben, parti de son camp avec plusieurs mètres de retard sur Sergio Ramos à qui il grille la politesse, arrachera ce splendide commentaire à Omar Da Fonseca : “il va venir lui faire l’amour sans préliminaires.” Génie. Le dernier rempart espagnol aura vécu un cauchemar en 45 minutes, humilié par les Bataves et trahi par une fébrilité inhabituelle. Rien toutefois qu’un câlin de Sara Carbonero ne saurait réparer. Malin. Impossible de terminer sans évoquer l’élégance de Vincente del Bosque, sélectionneur, qui a eu un petit geste pour réconforter les joueurs présents sur le banc. Ça peut encore le faire pour la qualif, néanmoins. Pour enrayer la recrudescence de paraskévidékatriaphobes qui viennent de se déclarer du côté de la péninsule ibérique, je suis moins optimiste…

Night time is the right time…

Quand tu vois le programme de la journée, tu te dis que Chili/Australie est un bon match pour une telle heure (00h). Un derby viticole qui présente peu d’intérêt étant donné la supposée faiblesse des Océaniens. Tu es en passe d’avoir raison avec le début de match épicé du Chili : Alexis (1-0, 12’) est imité par Valdivia (2-0, 14’) pour achever le suspense, croit-on. Sauf que Cahill réduit la marque d’un coup de casque monstrueux (2-1, 35’) et tout le reste de la partie se révèlera agréable à suivre. Jusqu’au but de Beausejour, sans conteste le plus beau nom du mondial (3-1, 90’+). “Qui ne sait que la nuit a des puissances telles, que les affiches pourries y sont, comme les fleurs, plus belles.” Alfred de Musset.

C’est tout pour cette journée, soyez heureux et méfiez-vous des citations.

À tantão…

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