Carnet d’Euro 2020 – Entrée #2 : “Everybody loves Chris…”

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Paolo Caliari, dit Veronese, est né en 1528 à Vérone. La belle Vérone, la ville où tout le monde se déteste. On voudrait partir, mais on reste. Bien à ses dépens, il illustre l’adage selon lequel ce n’est pas la taille qui compte.
En juin 1562, les Bénédictins du monastère vénitien de San Giorgio Maggiore lui commandent un tableau pour le réfectoire de l’établissement. 15 mois de dur labeur aboutissent à une imposante huile sur toile de près de 7 mètres par 10 : Les Noces de Cana. Aucun lien avec Lorik, le milieu n’a sans doute jamais suivi le GPS pastoral jusqu’en Galilée.
Deux siècles plus tard, à la faveur du traité de paix de Campoformio, la toile est attribuée à la France, puis exposée au Muséum Central des arts de la République, ancienne appellation du Musée du Louvre. Aujourd’hui, elle trône dans la Salle des États, au niveau 1 de l’aile Denon (du nom de l’ancien directeur général des lieux, inventeur de la disquette, lorsqu’en 1815, il oppose à la demande de rétrocession autrichienne l’argument d’un transport potentiellement périlleux pour l’intégrité de l’œuvre).
L’histoire serait belle si le mur opposé de la Salle 711 n’abritait pas, sous une épaisse cloche de verre, un timbre-poste de 77 centimètres par 53 ; la peinture bâclée d’une jeune femme au sourire énigmatique, souffrant d’alopécie sourcilière. Elle pose de trois quarts, les visiteurs lui tournent le dos pour capturer un selfie de face destiné à servir de photo de profil. Un ballet incessant auquel assistent, impuissants, les 130 personnages croqués par Veronese. Bref, les 67m² de Paolo font pâle figure face au confetti de Leonardo.

D’aucuns pourraient s’étonner de la fascination qu’exercent les portraits de petite taille, si d’aucuns n’avaient pas grandi avec les produits d’un groupe transalpin dont la raison sociale évoque davantage le régime alimentaire d’un étudiant fauché qu’une maison d’édition célèbre pour ses images autocollantes. La genèse de cette saga familiale remonte à la fin des années 1950. Inspirés par le succès des vignettes de footballeurs glissées dans les tablettes de chocolat – elles-mêmes glissées dans le papier d’alu par les marmottes –, les frangins Panini, alors vendeurs de journaux, adoptent ce subterfuge pour écouler leurs périodiques. Surfant sur la vague, ils créent le premier Calciatori en 1961 : le prototype des albums consacrés au ballon rond.
Depuis 60 ans, ces collections peuplent l’imaginaire de gamins partout sur la planète, qu’ils se trouvent aux prémices ou à l’automne des 40 premières années de leur adolescence. La fièvre des années paires.
La recette est quasiment immuable, à l’exception des vignettes devenues autocollantes au début des 70s et du récent passage au format paysage – pour faire entrer la tête de Mbappé. Des images qui font le bonheur des enfants autant qu’elles angoissent les parents, contraints à débourser entre le PIB de la Grèce et un demi-SMIC afin que leur progéniture puisse compléter un album qu’elle remisera aux oubliettes sitôt la compétition arrivée à son terme.

Ce samedi 12 juin après-midi, une autre image figée a causé stupeur, angoisse, et vive inquiétude aux spectateurs du continent entier, cette fois-ci. Lors de l’entrée en matière de son pays, le meneur de jeu danois Christian Eriksen s’est effondré en recevant le ballon sur une rentrée de touche, victime d’un arrêt cardiaque. Secouru promptement par son capitaine Simon Kjær, puis par la remarquable équipe médicale, parvenue à le réanimer au bout d’un temps qui a confiné à l’éternité, il a pu être évacué et transporté à l’hôpital dans un état stable, laissant ses partenaires, adversaires et les 14000 spectateurs du Parken de Copenhague groggy.
Mais qu’est-ce qu’on peut bien faire, après ça ? Reprendre le jeu, selon l’UEFA. Encore une masterclass d’élégance de l’instance ; cette dernière aurait en effet proposé les alternatives suivantes : la reprise à 20h30, le report au lendemain midi ou la défaite par forfait. L’Union of European Football Associations a été fondée en 1954 ; une paire d’années avant la honte, visiblement.

Selon la loi 2 du jeu édictée par l’International Football Board (IFAB), le poids d’un ballon au coup d’envoi d’une rencontre doit être compris entre 410 et 450 grammes, pour une circonférence comprise entre 68 et 70 centimètres. À titre de comparaison, le poids d’un cœur humain est d’environ 300 grammes, pour une taille d’1,5 fois celle d’un poing fermé. L’important, c’est pas les 3 points, c’est le poing et demi…

 

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PAYS DE GALLES 1-1 SUISSE
/ EMBOLO 49’, MOORE 74’

Dans une opposition d’abord marquée par de belles interventions de la part de portiers inspirés, le tableau d’affichage s’est finalement débloqué sur deux coups de casque décroisés consécutifs à des corners : le mètre quatre-vingt-seize de Kieffer Moore a répondu au mètre quatre-vingt-cinq de Breel Embolo. Un tête-à-tête qui renvoie les 2 formations dos à dos.

 

Danemark-Finlande_12062021


DANEMARK 0-1 FINLANDE
/ POHJANPALO 60’

Lorsqu’André-Pierre Gignac a catapulté du crâne le ballon dans les filets de Manuel Neuer le 13 novembre 2015, une bonne partie du Stade de France avait l’esprit préoccupé par les événements survenus à quelques kilomètres de là. Hasard ou coïncidence, c’est également de la tête que Joel Pohjanpalo a trompé la vigilance de Kasper Schmeichel, reprenant un centre de Jere Uronen pour inscrire l’unique but d’une deuxième mi-temps “fantôme”, à l’image de son aînée dionysienne. Lancé dans un sprint, l’auteur a eu in extremis la présence d’esprit d’interrompre sa célébration, soulageant par la même occasion l’affluence, dispensée d’avoir à scander un nom aussi compliqué…

 

Belgique-Russie_12062021


BELGIQUE 3-0 RUSSIE
/ LUKAKU 10’, 88’, MEUNIER 34’

Chris! Chris! Sterkte, jongen! I love you!

Ce sont les mots prononcés par Romelu Lukaku à l’intention de son partenaire de club. “Chris ! Chris ! Bonne chance, mon garçon ! Je t’aime !” #GoogleTrad
Suite à son ouverture du score précoce, le buteur des Diables Rouges a trottiné vers le cadreur en bord-terrain pour adresser sa carte de vœux de prompt rétablissement en Mondovision. Enfin, en Eurovision, en l’occurrence. Classe !
Belgium, 10 points! La Belgique, 10 points ! Bah ouais, deux points en moins pour le néerlandais, faut quand même pas déconner…

La missive de Romelu est venue s’ajouter aux nombreux messages de soutien émanant du microcosme du football. La communauté s’est unanimement mobilisée pour formuler une jolie déclaration à Chris, né un jour de Saint-Valentin.  C’était en 1992, c’est marqué en bas à gauche de sa vignette…

À tantôt…

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