Cahier de Mondial 2018 – Entrée #27 : “J'ai peur de l'avion…”

J'aimerais faire comme tout l'monde / Trouver ça naturel / D'être expulsé d'une Coupe du monde / Jusqu'au milieu du ciel... Dans le barda du parfait supporter, calée entre la mauvaise foi et un reliquat moribond de vie sociale, on distingue la fébrilité. Celle qui l'étreint avant chaque rencontre un tant soit peu importante de son équipe de cœur. En 2018, des contingents d'angoissé(e)s se retrouvent autour de leur sélection nationale, les rangs plus garnis que jamais. Il est en effet bien malaisé d'échapper à la conscription quadriennale. Sans doute le résultat de la croyance séculaire qu'un engouement de masse permettra de présider à la destinée de ses favoris dans la compétition ; une ambiance volcanique afin de retarder les derniers jours de ton pays... Au fil des semaines, cette fébrilité s'est muée en peur, peur que le nom de 23 de leurs compatriotes vienne grossir le manifeste d'un vol retour au départ de la Russie. Bon, dans les faits, ce n'est pas tout à fait ce qui attend le vaincu de l'antichambre de la finale, il y a d'abord le match de classement à disputer, une lutte pour le strapontin de 3e. Ça ressemble fort à la veste de secours sous le siège que le PNC indique à l'ensemble de la cabine dans une chorégraphie qui n'a rien à envier à feu la tecktonik : tout au plus un pis-aller. Un accessit justifiant la case à cocher business et pas pleasure sous l'objet du voyage...
Le 10 juillet 1856, Nikola Tesla a vu le jour à Smiljan (actuelle Croatie). Un siècle et demi plus tard, un constructeur automobile de véhicules électriques lui a emprunté son patronyme. À sa tête, le fantasque entrepreneur sud-africain Elon Musk, principale source d'inspiration du personnage de Tony Stark aka Iron Man dans les productions en 6 lettres au fond vert dont on parlait encore ici. La coïncidence ne s'arrête pas en si bon chemin, puisque l'inventeur serbe naturalisé américain est l'un des derniers rôles incarnés par David Bowie dans Le Prestige de Christopher Nolan. Un thriller fantastique adapté du roman de Christopher Priest, qui aura 75 ans dans 4 jours - l'auteur, pas le livre. Il relate la rivalité entre deux prestidigitateurs à la fin du XIXe. Deux illusionnistes qui furent d'abord amis et associés avant de s'écharper. À l'image de la Fête des voisins qui nous est proposée ce 10 juillet 162 ap. N.T. entre Français et Belges, première affiche de ce dernier carré. Ça risque de se friter sévère car la finale, tout le monde y pense. Et personne ne veut son billet retour...



France-Belgique-10072018

FRANCE 1-0 BELGIQUE / UMTITI 51’

Couloir de l'amor

D'emblée, les observateurs ont compris qu'on ne partait pas sur la déclinaison parisienne d'Immeubles en fête. Il y a effectivement beaucoup de complicité entre les joueurs des deux formations, qui se saluent chaleureusement avant de pénétrer sur le terrain. L'accolade entre Thierry Henry - T3 de Roberto Martínez chargé des lignes offensives - et Didier Deschamps n'échappe pas à l'œil des caméras, pas plus que les poussières à celui du téléspectateur. Putain, 20 ans...

La Marseillaise précède La Brabançonne sous le regard de la Reine Mathilde, du Roi Philipe, de Jupiter et du Président de la FIFA, Gianni Infantino. Les capitaines procèdent au traditionnel échange de fanion. Eden Hazard offre à Hugo Lloris un petit sac en carton : un ballotin Jeff de Bruges au cas où La Dèche choisirait d'aligner Steve Mandanda ?

Le protocole est l'occasion d'apprécier à nouveau la plaisanterie filée de la part des instances. En 1/8e, les Bleus ont éliminé l'Argentine ► En 1/4, ils ont été arbitrés par Néstor Pitana, un Argentin. En 1/4, les Bleus ont éliminé l'Uruguay ► En 1/2, ils seront arbitrés par Andrés Cunha, un Uruguayen. Spoiler : aucun officiel belge n'a été retenu pour le tournoi...

Donne-leur Eden, ils t'en font un Enfer

1’ : Une piste d'athlétisme aux normes IAAF est divisée en 8 ou 9 couloirs. Il est communément admis que courir le plus à l'extérieur est un désavantage. Pourtant, Kylian Mbappé produit sa première accélération le long de la ligne de touche, dépose Jan Vertonghen puis Mousa Dembélé avant de centrer vers le point de penalty où Antoine Griezmann est devancé de justesse par Toby Alderweireld.

13’ : Une passe ratée de Nacer Chadli est interceptée par N'Golo Kanté, qui joue en une touche sur Griezmann. En pivotant, le Madrilène trouve Paul Pogba. D'une feinte de corps, il élimine Dembélé et lance Mbappé en profondeur, plein axe. Une piste d'athlétisme aux normes IAAF est divisée en 8 ou 9 couloirs. Il est communément admis que courir au centre est un avantage. Pourtant, les plans de l'attaquant sont contrariés par la bonne anticipation de Thibaut Courtois.

15’ : Premier point chaud. Sur un ballon en retrait approximatif, Lloris dégage en urgence. Ça revient sur Kevin De Bruyne qui sert astucieusement Hazard au-dessus de Kanté et Raphaël Varane. Le meneur de Chelsea frappe, mais c'est trop croisé.

18’ : Trop pure, la puissante demi-volée de Blaise Matuidi est captée sans difficulté par Courtois. La dernière fois que le milieu a trouvé les filets sans que la position de son corps ne défie les lois de la physique, on pouvait encore se déplacer sereinement après avoir gagné un match aller par 4 buts d'écart.

19’ : Hazard élimine (trop) facilement Benjamin Pavard - preuve que la formation lilloise n'est plus ce qu'elle était -, se met sur son pied droit et enroule un tir prometteur que Varane dévie en corner juste devant son gardien - preuve que la formation lensoise est toujours ce qu'elle était.

Poing Lloris. C'est comme le point Godwin, mais l'étoile sur la poitrine a moins de branches :

20’ : Look, up in the sky! It's a bird! It's a plane! It's Spurs man! Sortie spectaculaire au devant de Marouane Fellaini.

21’ : À la réception du corner de Chadli, le contrôle manqué de Fellaini se transforme en décalage pour Alderweireld. La frappe en pivot de l'arrière central est sublimement sortie par son partenaire de club. La parade - une négation horizontale d'un désir perpendiculaire. Hugo fait le Shaw.

23’ : Samuel Umtiti adresse une longue ouverture à Olivier Giroud, qui n'arrive pas à redresser suffisamment le ballon pour battre son partenaire de club. Fête des voisins, on a dit...

31’ : La France obtient un coup franc à une trentaine de mètres, consécutif à une faute de Vertonghen sur Mbappé. Griezmann décale Pavard sur le côté droit. Le centre du Stuttgartois trouve la tête plongeante de Giroud. Comme Sarah Connor, c'est à côté.

34’ : Griezmann renverse sur Mbappé. Sa remise instantanée place Giroud en position idéale. L'Olivier se plante. Strike.

39’ : Le jeu à deux entre Pavard et Mbappé débouche sur un excellent service du je pour le deux. La frappe croisée depuis l'angle des 5,50 m du latéral est détournée du pied par Courtois.

► MI-TEMPS ◄

On revient après une page en couleur.

Il en suffira d'une

50-51’ : Côté gauche, Lucas Hernandez alerte Matuidi. La Pieuvre trouve Giroud au cœur de la surface de réparation dont le contrôle orienté lui permet, pense-t-on, de se défaire de Vincent Kompany et armer de son mauvais pied (je vous entends dire “lequel ?”). Las, le cityzen parvient à s'interposer.

On a envie de lui dire ça va passer, ça va passer à un moment donné, Olivier Giroud, qui n'a pas encore cadré une seule frappe depuis le début de cette Coupe du monde. Il en suffira d'une...” Grégoire Margotton, oracle.

Dans la continuité, le corner est botté rentrant par Griezmann. La trajectoire est coupée par Umtiti, plus prompt que Fellaini. Fellaini coiffé au poteau, la fashion police en rêvait. (1-0)

L'ancien Lyonnais célèbre l'ouverture du score d'une démarche chaloupée. Inspirée par la présence de Mick Jagger dans la corbeille du Krestovski ?

56’ : On prend les mêmes et on recommence. Hernandez ► Matuidi, déviation en une touche, roulette et passe de la semelle de Mbappé pour un Giroud trop lent, repris par le tacle de Dembélé. Bonsoir Cruella, j'ai l'impression d'avoir déjà écrit cette phrase, pouvez-vous me dire si c'est le cas ?

65’ : À l'autre bout du très bon centre de Dries Mertens, nouvel entrant, Fellaini prend le meilleur sur son partenaire de club Pogba. Son coup de casque file tout près du montant.

81’ : Hazard combine avec Lukaku, se voit dépossédé du ballon par une intervention de Varane. Le cuir continue sa course jusqu'à Axel Witsel, auteur d'un tir tendu sur lequel Lloris, encore lui, se détend parfaitement.
Sur le renvoi, Hazard percute violemment Matuidi. Le ralenti saisissant son expression est l'une des images du Mondial, à n'en pas douter, fournissant matière aux esprits facétieux avides de détournements.

Matuidi-France-Belgique-10072018

89’ : La passe insensée de De Bruyne frôle le sommet du crâne de Lukaku. Les magiciens roux ne squattent pas uniquement les pages de J.K. Rowling...

On annonce 6 minutes de temps additionnel. Michy Batshuayi fait son entrée, rejoignant De Bruyne, Ferreira Carrasco, Hazard, Lukaku et Mertens sur le gazon. Le joueur le plus défensif de la Belgique devient le ramasseur de balles derrière la cage.

90’+2 : Sur une rentrée de touche des Diables, Kanté intercepte de la tête (!) le lancer d'Alderweireld. Pogba se retourne et sert remarquablement Griezmann dont le tir est moins efficace qu'un KitKat pour faire le break.

90’+6 : La Pioche passe devant De Bruyne et glisse à Corentin Tolisso, à l'opposé. Le pensionnaire du Bayern est dans un fauteuil pour porter l'extrême-onction, mais sa frappe du gauche est sortie du bout du gant par le portier.

Coups de sifflet finaux.

Pour la deuxième fois de son histoire, l'équipe de France s'invite au dîner de gala le plus select du football mondial, 2 ans jour pour jour après un douloureux Frexit sportif. Demain, elle saura qui de la Croatie ou de l'Angleterre viendra s'asseoir à sa table.

En zone mixte, certains Belges ont fustigé la pusillanimité tricolore. Le beau jeu laid nouveau est arrivé mais vu le score étriqué, on ne peut pas le taxer de piquette...

La retransmission s'achève sur cet échange entre Bixente Lizarazu et Grégoire Margotton, qui s'agitait, au moment de rendre l'antenne :

- Vous bougez beaucoup les bras, non ?
- Un peu, mais ça fait rien !
On aime autant que ce soit lui plutôt que l'agent de piste sur le tarmac...

À тантôт…

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